mmanuel Haddad (à Notre-Dame de Béchouate, vallée de la Bekaa) , le 28/09/2017 à 6h23
Né chiite, baptisé en 1986, le père Charbel Kheir El Din officie dans l’église maronite de Notre-Dame de Béchouate, dans la vallée de la Bekaa au Liban.
Le père Charbel cache plus d’un secret dans sa soutane. En voyant cet homme à la barbe blanche et aux yeux bleus confesser de jeunes paroissiens dans l’église de Notre-Dame de Béchouate dans la vallée de la Bekaa au Liban, visage débonnaire et blague facile, il est difficile d’imaginer qu’à leur âge, ce prêtre de 51 ans s’appelait Ali Kheir El Din, qu’il était musulman chiite, bagarreur.
« Peu de gens auraient pu vivre l’existence que j’ai menée de 15 à 20 ans, se souvient-il. C’était la guerre, je faisais partie d’un groupe d’énervés, je semais la peur autour de moi. À 18 ans, lors de mon service militaire obligatoire, j’ai rencontré Saïd Irani, un chrétien au sens le plus profond. Alors que je le provoquais voire l’opprimais sur sa religion, il me répondait avec douceur. Peu à peu, je l’ai suivi à l’église. Moi qui ne m’étais jamais agenouillé devant personne, j’ai prié à genoux et j’ai ressenti une paix intérieure. »
« Le plus beau jour de ma vie. »
Du jour au lendemain, le rebelle se fait aimant et respectueux. Son père, surpris, l’emmène voir un psychologue, le croyant malade ! Le jeune homme découvre la Bible, suit pendant un an des cours de catéchisme, puis décide de se faire baptiser : « C’était le 14 septembre 1986, jour de la fête de la Croix. Le plus beau jour de ma vie. »
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Son père fulmine. Dans le village chiite de Majdaoun, la famille Kheir El Din exclut ce rejeton. Pendant douze ans, il ne les verra plus. Soldat de l’armée libanaise, il vit à la caserne et va prier le dimanche, découvrant peu à peu le message du Christ. « Jésus a dit :”Je suis la lumière du monde, celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres”. Moi j’en avais marre de marcher dans les ténèbres », sourit-il.
« C’était mon chemin de croix. »
Sa route sera accidentée. Ali quitte l’armée, rejoint un groupe d’évangélistes à Deir El-Ahmar, puis, après cinq ans d’études religieuses, devient diacre dans l’Église maronite. « La hiérarchie avait peur de moi. J’aurais dû être nommé prêtre en 1996. Je ne le suis devenu qu’en 2016. C’était mon chemin de croix. »
Qu’importe, le père Charbel enseigne à ses paroissiens que, si la vie est pleine de souffrances, l’amour de Jésus soigne tous les maux.
https://www.la-croix.com/Religion/Catholicisme/Monde/Musulman-chiite-puis-soldat-larmee-libanaise-aujourdhui-pretre-maronite-2017-09-28-1200880313