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Olj-10/3/2013-
Olj-10/3/2013-
Une danse macabre
En cette période électorale, les propositions de lois s'enchevêtrent, les idées s'emmêlent et se brouillent. Comme il est souvent d'usage avec nos gouvernants, la loi électorale qui traduit l'exercice du pouvoir prôné par la Constitution se trouve, le dernier quart d'heure, malmenée tout autant que l'électeur libanais qui ne sait plus à quel saint se vouer.
À quelques jours de la paralysie économique locale, à quelques kilomètres du massacre syrien, à quelques encablures de la manipulation israélienne, à quelques semaines des sessions du tribunal international, le Liban aborde probablement la phase la plus critique de son histoire contemporaine.
Jamais, au grand jamais, la déprime n'a été aussi globale. À aucun moment, même aux pires instants de la guerre, la panique n'a été aussi générale.
La crise n'affecte pas seulement les institutions du pays, elle envahit carrément l'esprit des Libanais, imprègne leurs méninges, bloque leur dynamisme, paralyse leur initiative, limitant leurs actes, déformant leur excellence intellectuelle et polluant leur singularité culturelle.
Rien n'est plus ce qu'il était. Rien ne se dessine de ce qui sera : la guerre civile, sans reprendre, - pas encore - sur le terrain, s'installe à l'état endémique avec ses barricades confessionnelles qui bloquent toute recherche raisonnable et raisonnée des consensus nationaux. À telle enseigne que l'on se demande désormais si le Liban est mort. Pas celui de papa seulement, mais même celui, virtuel ou possible, de nos enfants.
Les récents débats à la Chambre sont venus confirmer mes craintes et conforter mes certitudes : sortir de l'impasse électorale devient, dès lors, une nécessité accessoirement arithmétique pour les uns ou pour les autres, mais assurément existentielle pour tous. Dans les années 70-90, la libanisation s'était, malgré les affres de la guerre, distinguée de la yougoslavisation. Mais la spirale infernale dans laquelle le pays s'est engagé pourrait, si elle ne s'interrompt pas, déboucher sur une Slovénie catholique, une Serbie orthodoxe, une Bosnie sunnite, un Monténégro druze, une Croatie maronite et un Kosovo chiite. Avec pour la comparaison rapprochée un tribunal international, des attentats meurtriers, des milices armées, une polémique venimeuse et des institutions amputées.
La proximité du printemps arabe est, en ce sens, une opportunité et un risque. Le Liban saura-t-il prendre le virage du renouveau arabe pour en atténuer les dérives extrémistes et en renforcer la mouvance démocratique ? Ou au contraire, s'inscrira-t-il dans le sillage de l'effritement national au profit de la cantonisation effrénée ?
Faut-il pour autant, comme l'on fait certains – allant un peu vite en besogne –, prononcer l'oraison funèbre du 14 Mars ? Certainement pas. La très peu orthodoxe et sûrement pas catholique loi Ferzli a beau avoir été votée par deux composantes partisanes du 14 Mars, elle vivra à peine autant que les bouteilles de champagne ouvertes par le général. Rien ne la fera passer en séance plénière, rien ne lui permettra d'obtenir l'aval du Conseil constitutionnel, rien ne la fera appliquer à l'échelle nationale, dans les bureaux de vote. Même ceux qui ont été emportés par la course démagogique aux miettes de la prochaine assemblée renient déjà la paternité de la proposition, la déposant devant l'orphelinat de M. Berry et cherchant une nouvelle fertilisation in vitro des prochaines échéances parlementaires.
S'il ne s'agissait, en définitive, que d'un simple jeu de majorité et de minorité, l'enjeu serait minime. Mais les partis et les communautés libanaises se laissent entraîner dans une opération qui les dépasse et dont le pays, autant qu'eux, fera les frais. De nombreuses tragédies de type palestinien se profilent à l'horizon syrien et irakien. Et les fantasmes conjugués des mini-États ou d'une alliance des minorités pourraient se terminer par un laminage du Liban entre les rouleaux compresseurs sunnite et chiite ou par une alliance retrouvée des deux majorités au détriment de tous les autres.
La danse macabre autour des lois imaginées par les fossoyeurs du Liban démocratique et convivial doit cesser. Ni les soutanes, aussi rutilantes soient-elles, ni les barbes aussi fournies qu'elles puissent être ne sauraient nous faire perdre le vrai discernement de lendemains modernes et prometteurs. Sinon les Libanais pères, mères, fils et filles y perdront non seulement leur nation, mais aussi leur résidence. Et à coup sûr leurs espoirs.
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À quelques jours de la paralysie économique locale, à quelques kilomètres du massacre syrien, à quelques encablures de la manipulation israélienne, à quelques semaines des sessions du tribunal international, le Liban aborde probablement la phase la plus critique de son histoire contemporaine.
Jamais, au grand jamais, la déprime n'a été aussi globale. À aucun moment, même aux pires instants de la guerre, la panique n'a été aussi générale.
La crise n'affecte pas seulement les institutions du pays, elle envahit carrément l'esprit des Libanais, imprègne leurs méninges, bloque leur dynamisme, paralyse leur initiative, limitant leurs actes, déformant leur excellence intellectuelle et polluant leur singularité culturelle.
Rien n'est plus ce qu'il était. Rien ne se dessine de ce qui sera : la guerre civile, sans reprendre, - pas encore - sur le terrain, s'installe à l'état endémique avec ses barricades confessionnelles qui bloquent toute recherche raisonnable et raisonnée des consensus nationaux. À telle enseigne que l'on se demande désormais si le Liban est mort. Pas celui de papa seulement, mais même celui, virtuel ou possible, de nos enfants.
Les récents débats à la Chambre sont venus confirmer mes craintes et conforter mes certitudes : sortir de l'impasse électorale devient, dès lors, une nécessité accessoirement arithmétique pour les uns ou pour les autres, mais assurément existentielle pour tous. Dans les années 70-90, la libanisation s'était, malgré les affres de la guerre, distinguée de la yougoslavisation. Mais la spirale infernale dans laquelle le pays s'est engagé pourrait, si elle ne s'interrompt pas, déboucher sur une Slovénie catholique, une Serbie orthodoxe, une Bosnie sunnite, un Monténégro druze, une Croatie maronite et un Kosovo chiite. Avec pour la comparaison rapprochée un tribunal international, des attentats meurtriers, des milices armées, une polémique venimeuse et des institutions amputées.
La proximité du printemps arabe est, en ce sens, une opportunité et un risque. Le Liban saura-t-il prendre le virage du renouveau arabe pour en atténuer les dérives extrémistes et en renforcer la mouvance démocratique ? Ou au contraire, s'inscrira-t-il dans le sillage de l'effritement national au profit de la cantonisation effrénée ?
Faut-il pour autant, comme l'on fait certains – allant un peu vite en besogne –, prononcer l'oraison funèbre du 14 Mars ? Certainement pas. La très peu orthodoxe et sûrement pas catholique loi Ferzli a beau avoir été votée par deux composantes partisanes du 14 Mars, elle vivra à peine autant que les bouteilles de champagne ouvertes par le général. Rien ne la fera passer en séance plénière, rien ne lui permettra d'obtenir l'aval du Conseil constitutionnel, rien ne la fera appliquer à l'échelle nationale, dans les bureaux de vote. Même ceux qui ont été emportés par la course démagogique aux miettes de la prochaine assemblée renient déjà la paternité de la proposition, la déposant devant l'orphelinat de M. Berry et cherchant une nouvelle fertilisation in vitro des prochaines échéances parlementaires.
S'il ne s'agissait, en définitive, que d'un simple jeu de majorité et de minorité, l'enjeu serait minime. Mais les partis et les communautés libanaises se laissent entraîner dans une opération qui les dépasse et dont le pays, autant qu'eux, fera les frais. De nombreuses tragédies de type palestinien se profilent à l'horizon syrien et irakien. Et les fantasmes conjugués des mini-États ou d'une alliance des minorités pourraient se terminer par un laminage du Liban entre les rouleaux compresseurs sunnite et chiite ou par une alliance retrouvée des deux majorités au détriment de tous les autres.
La danse macabre autour des lois imaginées par les fossoyeurs du Liban démocratique et convivial doit cesser. Ni les soutanes, aussi rutilantes soient-elles, ni les barbes aussi fournies qu'elles puissent être ne sauraient nous faire perdre le vrai discernement de lendemains modernes et prometteurs. Sinon les Libanais pères, mères, fils et filles y perdront non seulement leur nation, mais aussi leur résidence. Et à coup sûr leurs espoirs.
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